Je me souviens très précisément de cette première fois, dans la salle de chimiothérapie. L’odeur. Le silence tendu. Les regards. Ce moment-là a marqué un basculement : j’ai compris que je ne contrôlais plus rien. Mon corps m’échappait. Il ne restait qu’une chose à faire : faire confiance. Me confier. À plus grand. À la vie.

C’est là que quelque chose s’est ouvert. Non pas dans la lutte, mais dans l’abandon à ce qui est. Au cœur de cette traversée, j’ai reçu un soutien d’une intensité rare. Lors d’un stage en Suisse, des femmes se sont rassemblées autour de moi dans une forme de présence profondément enveloppante. À travers leurs gestes, leurs silences, leurs intentions, j’ai senti une force collective à l’œuvre — douce, invisible, et pourtant puissamment incarnée.

Pendant ces mois d’épreuve, j’ai renoué avec ce qui me tient vivante : les cartes que je tirais chaque matin, l’écriture qui m’aidait à nommer l’indicible, la nature qui m’apprenait à respirer. Pas à pas, j’ai réappris à vivre, autrement.

Il y a une phrase qui m’a accompagnée, comme un fil rouge :

« Ce qui fait la nuit en nous peut laisser en nous les étoiles. » — Victor Hugo.

Aujourd’hui encore, je sais que les plus grandes douleurs peuvent enfanter de la lumière.

Mon symbole, c’est le coquelicot.

Fragile en apparence, mais incroyablement résilient. Il pousse là où on ne l’attend pas, au bord des routes, au cœur des friches. Il s’ouvre rouge, flamboyant, là où la terre a été retournée. Comme moi.